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Quelle stratégie pour trouver votre océan bleu ?

Personne n’aime la concurrence, pas plus vous que moi. Pourtant ne pas avoir de concurrent signifie qu’il n’y a pas de marché solvable. Il est pourtant possible de trouver un marché solvable sans concurrent, bref un paradis pour entrepreneur. Le secret ? La stratégie Océan bleu, exposée par W. Chan Kim et Renée Mauborgne, chercheurs au Blue Ocean Strategy Institute à l’INSEAD.
Ces deux auteurs expliquent que les entreprises peuvent être en mesure de créer une nouvelle demande dans un espace encore vierge de toute concurrence ce qui peut lui assurer une forte croissance et des profits élevés. Cet espace vierge, les auteurs l’appellent Océan bleu par contraste avec l’Océan rouge.

D’un océan à l’autre

Deux océans co-existent : un rouge et un bleu. Voyons qu’elles sont les caractéristiques de ces deux océans différents, en commençant par le plus commun.

L’Océan rouge : l’océan de tous les dangers

L’Océan rouge, c’est l’espace déjà connu par tout le monde. Chacun connaît l’ensemble des acteurs existants : clients, fournisseurs, partenaires, concurrents. Les règles sur cet océan sont connues de tous. Le but des entreprises est ici de dépasser ses concurrents en leur prenant des parts de marché en tâchant de ne pas en perdre soi-même.
Ici, le marché est vu comme un espace fini : le camembert que se partagent les concurrents ne peut s’agrandir que très difficilement et une part de marché gagnée, l’est au détriment de quelqu’un d’autre.
La compétition entre les différentes entreprises concurrentes se traduit souvent pas une lutte sanglante, d’où la métaphore de l’Océan rouge.

L’Océan bleu : l’océan rêvé

À la différence des Océans rouges, les Océans bleus présente deux avantages.
D’une part, vous vous positionnez sur un espace vierge : le marché est inconnu. L’entreprise qui se lance sur une telle stratégie crée une demande. Elle propose un produit ou un service qui n’existe pas encore plutôt que de proposer quelque chose qui existe déjà. Dans la mesure où l’espace est vide, la croissance du chiffre d’affaires peut être rapide et importante.

D’autre part, l’autre avantage pour vous. Vous fixez les règles à suivre sur ce marché.
La stratégie Océan bleu repose sur un élément fondamental : l’innovation utile (value innovation). Cette forme d’innovation crée de la valeur pour le client et donc, au final, pour l’entreprise.
Le gage de la réussite de cette stratégie repose sur la création de valeur pour le client, quitte à sacrifier des fonctionnalités inutiles pour lui.
Toutefois, toutes les entreprises doivent sans cesse chercher de nouveaux Océans bleus : une fois qu’un concurrent à repérer cet océan clément, il a beau jeu de venir y jouer pour prendre des parts de marché qui sont encore relativement faciles à prendre. On le voit tout Océan bleu à vocation à rougir petit à petit, au fur et à mesure de l’arrivée des concurrents.

Comment mettre en oeuvre cette stratégie d’Océan bleu ?

Il y a 6 principes à mettre en oeuvre pour suivre une stratégie Océan bleu. Je vais prendre un exemple de produit bien connu pour illustrer mes propos : l’iPhone lancé par Apple en juin 2007, il y a tout juste 10 ans.

1. Redéfinir le marché

Le premier principe est de redéfinir ce que vous entendez comme votre marché. Ainsi en 2007, Apple n’est pas présent sur le marché des téléphones portables. Son ou plutôt ses marchés de prédilection sont les ordinateurs avec notamment les Macbook et les baladeurs numériques avec l’iPod.
De plus, en 2007, le marché des téléphones portables est dominé par Nokia avec 37,8%, Motorola 14,3% et Samsung avec 13,4% (chiffres de ZDNet). Ce marché ressemble plus à un Océan rouge qu’à un Océan bleu. Et pourtant, Steve Jobs a décidé que ce serait un Océan bleu pour Apple.

L’iPhone que lance Apple ne ressemble en rien aux téléphones proposés par les entreprises présentes sur ce marché.

Voici la vidéo de présentation de l’iPhone de juin 2007.

Vous pouvez, en fonction de votre stratégie ignorer une partie du marché. C’est ce qu’a fait Apple avec le marché des téléphones portables d’entrée de gamme,

Vous pouvez également réinventer ce marché. L’iPhone était bien plus performant que les autres téléphones pour la lecture de musique.

2. Être focalisé sur le client

L’autre principe de la stratégie de l’Océan bleu est de centrer son innovation sur le client. Cette stratégie peut être mise en place avec succès en utilisant le Design thinking et ses outils. Vous devez savoir ce qui est important pour vous clients, notamment en terme de fonctionnalités. Le Design thinking est idéal pour cela.

De plus, Steve Jobs n’a pas demandé à ses clients s’ils voulaient un nouveau téléphone portable. Au contraire, Apple s’est basé sur une fine observation des utilisateurs de téléphones portables et à découvert des insights. Cela a donné un téléphone tactile de bien meilleure qualité que ce déjà présents sur le marché. Il n’y a plus qu’un seul bouton contre un clavier pour ses concurrents.

Ainsi, l’expérience client est bien plus intuitive avec un clavier tactile qu’avec un petit clavier. l’iPhone a changé la manière qu’ont les clients d’utiliser leur téléphone.

Par ailleurs, le prix de l’iPhone, bien plus élevé que celui de ses concurrents n’a pourtant pas empêché Apple de conquérir très vite une grande part de marché sur ces téléphones d’un nouveau genre.

Il est très difficile de designer un produit à travers des focus groups. La plupart du temps, les gens ne savent pas ce qu’ils veulent avant que vous leur ayez montré…

Steve Jobs

3. Ne pas tenir compte du marché actuel

Pour qu’une stratégie Océan bleu fonctionne il ne faut pas tenir uniquement compte du marché existant. L’idée que soutend cette stratégie qu’il faut aller au delà du marché déjà connu pour se créer un marché à soi.

Si avoir un smartphone dans la poche est aujourd’hui parfaitement normal, ce n’était absolument pas le cas en 2007. L’iPhone, premier téléphone à écran tactile sur le marché est commercialisé en exclusivité par Orange. Il n’y avait à l’époque qu’un seul opérateur, Ten, qui proposait un accès web mobile et illimité.

Par ailleurs, le lancement de l’iPhone a été l’occasion de lancer une nouvelle génération de téléphones portables mais également de nouvelles offres d’abonnements pour les opérateurs français. Enfin, la manière d’utiliser son téléphone a radicalement changé. La fonction première du téléphone, la voix est presque devenue marginale.

4. Avoir une stratégie séquentielle

L’innovation qu’apporte l’iPhone est clairement une expérience utilisateur bien meilleure que celle des téléphones présents sur le marché en 2007. Vous devez vous poser trois questions :

5. Lever les obstacles internes

Pour qu’une stratégie de type Océan bleu soit pleinement un succès, il est important pour ne pas dire primordial que l’ensemble des membres de l’équipe porte le projet.

Ensuite, une culture d’entreprise favorisant et promouvant l’innovation permet de limiter drastiquement les éventuels freins à ce type de stratégie. Steve Jobs, dirigeant d »Apple en 2007 a su mettre en place une telle culture propice à une évolution radicale de l’entreprise.

Mais, dans une entreprise avec une culture que je qualifierai de plus traditionnelle, des résistances au changement peuvent apparaître. Ces résistances sont normales et il est dès lors nécessaire d’accompagner les salariés inquiets et de leur montrer l’intérêt pour eux et l’entreprise de s’orienter vers un nouveau type de stratégie.

6. L’exécution doit être pensée en amont

Rien ne doit être laissé au hasard. L’exécution de la stratégie doit être pensée dès la genèse du projet. Le cap doit être fixé, quitte à laisser aux équipes en charge du projet des marges de manœuvre. Tous les acteurs de l’entreprise doivent être engagés dans la stratégie Océan bleu.

Dans le cadre du projet de l’iPhone, au moment de la présentation, même si l’appareil ne devait être commercialisé que cinq mois plus tard, ce n’était qu’un « prototype qui fonctionnait à peine » écrit le quotidien new-yorkais. Il n’y avait pas davantage de ligne de production mise en place. Il y avait, à l’époque, une centaine d’exemplaires, dont certains avaient encore des défauts. Le système d’exploitation qui faisait tourner le téléphone était également « plein de bugs ».

Pour lire l’aventure du lancement de l’iPhone, vous pouvez lire And then Steve said, ‘Let there be an iPhone’ sur le site du New-York Times.

Ainsi, on le voit, mettre en place une stratégie Océan bleu est loin d’être simple mais elle permet de se créer un marché où on est seul mettre à bord. C’est le paradis pour ceux qui n’aiment pas la concurrence.

Avez-vous d’autres exemples de mise en œuvre et de réussite de cette stratégie ?